AU FIL DES SEMAINES > L’ACTU – Votre épargne est bien en danger…

La nature de l’être humain est ainsi faite (en particulier en Europe) que tant qu’il ne se retrouve pas devant le fait accompli, il ne parvient pas à admettre la réalité des menaces environnantes.

Ainsi, depuis quelques années, nous n’avons cessé d’alerter sur le danger d’une ponction des comptes bancaires. Mais peu de personnes y ont cru. Et ce, en dépit des recommandations en ce sens formulées par le FMI au lendemain de la crise de 2008-2009. Des recommandations qui ont d’ailleurs été mises en pratique lors de la crise chypriote de 2013. A l’époque, en dépit de la réglementation bancaire qui interdisait la taxation unilatérale des dépôts à vue, le gouvernement chypriote, sous le haut patronage de l’Union européenne et du FMI, a tout simplement spolié une grande partie des dépôts bancaires au-delà de 100 000 euros. Comme cela concernait principalement de nombreux comptes off-shore et souvent mafieux, l’opinion publique ne s’en est pas émue outre-mesure, mais la boîte de Pandore avait bien été ouverte.

Plus récemment, la directive européenne relative au « redressement des banques et à la résolution de leurs défaillances » (BRRD) a enfoncé définitivement le clou. Celle-ci a d’ailleurs été transposée en France par ordonnance en toute discrétion il y a tout juste un an, le 21 août 2015, et est entrée en vigueur le 1er janvier 2016. Ainsi, depuis cette date, les comptes des clients dotés de plus de 100 000 euros de dépôts pourront être prélevés pour contribuer au sauvetage de leur banque.

Enfin, parachevant cette démarche vers une spoliation organisée des comptes bancaires, la BCE a consacré un taux de dépôt négatif. Il était d’abord de – 0,1 % en juin 2014, – 0,2 % en septembre 2014, puis – 0,3 % en décembre 2015 et a ensuite été abaissé à – 0,4 % le 16 mars 2016.

Autrement dit, depuis lors, lorsque les banques commerciales conservent des dépôts à la BCE, cela leur coûte 0,4 %. De la sorte, la BCE espère que les banques seront incitées à octroyer davantage de crédits plutôt que de stocker des dépôts.

es quantités colossales de liquidités sont déversées mais seul un petit filet d’eau est autorisé à irriguer l’économie…

Seulement voilà, on ne donne pas à boire à un âne qui n’a pas soif. Ainsi, en dépit d’un taux refi de 0 %, d’un taux de dépôt de – 0,4 % et d’une « planche à billets » de 80 milliards d’euros par mois, la croissance annuelle des crédits privés reste inférieure à 2 % dans la zone euro. C’est dire l’ampleur de l’écart entre les piètres résultats de la politique monétaire de la BCE et la démesure des moyens engagés.

A la décharge des banques, il faut souligner que les règles prudentielles sont beaucoup trop contraignantes et coûteuses en fonds propres. Elles imposent par exemple une quasi-égalité entre les crédits octroyés à des agents « risqués » (en fait les ménages et les PME) et les fonds propres requis. En d’autres termes, les banques pourront accorder X millions d’euros de crédits à ce type d’agents économiques si et seulement si les bénéficiaires disposent de X millions d’actifs en garantie. Une belle illustration du fameux adage « on ne prête qu’aux riches… »

Nous touchons là tout au paradoxe principal de la politique monétaire et bancaire européenne : des quantités colossales de liquidités sont déversées mais seul un petit filet d’eau est autorisé à irriguer l’économie…

Et ce n’est pas tout, puisque, dans la poursuite de cet effet pervers, les banques sont contraintes de prêter à des agents soi-disant non-risqués et notamment aux Etats européens. D’où la faiblesse excessive des taux d’intérêt des obligations d’Etat à moyen et long terme.

Dès lors, dans la mesure où les taux des obligations d’Etat sont quasiment équivalents aux taux monétaires, les banques ne parviennent plus à « gagner leur vie » avec leur métier de transformation (à savoir se financer à court terme, idéalement le moins cher possible pour prêter et/ou placer sur des produits obligataires à des taux bien plus élevés). Face à ces « conditions de vie » exsangues, certaines banques allemandes comme la Commerzbank et certaines caisses d’épargne, ou encore la banque danoise Danske Bank ont décidé depuis quelques mois de taxer de 0,4 % les comptes des clients professionnels, investisseurs ou entreprises, mais pour des dépôts très élevés et lors de négociations confidentielles.

La boîte de Pandore est donc définitivement grande ouverte.

Cette semaine, prolongeant la route vers la spoliation des particuliers, la petite banque coopérative bavaroise, Raiffeisen Gmund, a décidé d’aller encore plus loin, en instaurant des taux d’intérêt négatifs sur les dépôts de plus de 100.000 euros de ses clients privés.

La boîte de Pandore est donc définitivement grande ouverte. Il n’y a désormais plus aucune équivoque : lors de la prochaine crise financière, dans la mesure où les autorités monétaires et budgétaires du monde occidental, notamment en Europe et en particulier en France, n’ont plus de marge de manœuvre pour relancer la machine, la recommandation du FMI sera mise à exécution.

En l’occurrence, taxer les dépôts bancaires et l’épargne sur livret au sens large, à hauteur de 10 % au-delà d’un certain seuil, par exemple 100 000 euros. Autrement dit, tous les ménages et les entreprises disposant de plus de 100 000 euros sur n’importe quel type de comptes bancaires se verront ponctionner 10 % de leur « surplus ». Et ce « overnight », c’est-à-dire du jour au lendemain et sans sommation.

Nous avons tous été prévenus et avons même les premières preuves de ce danger imminent, il ne faudra donc pas se plaindre lorsque le casse du siècle aura lieu…

 

 (Owner, ACDEFI)