L’IDÉE REÇUE DE LA SEMAINE – « L’Afrique reçoit plus d’argent qu’elle n’en rembourse »

L’importance de l’aide étrangère demeure cruciale pour la plupart des quarante-huit pays de l’Afrique subsaharienne (ASS), alors qu’elle est devenue symbolique sinon dérisoire pour les autres régions du monde en développement. C’est une vérité incontournable, au moins jusqu’en 2025. Cette aide a évolué, certes, en dents de scie de 1960 à la fin des années 1990, mais, depuis l’an 2000, elle est en hausse jusqu’à atteindre son apogée en 2015 avec 50 milliards de dollars, contre 25 milliards en 2004 et 14 milliards en 2000.

Ces flux font de l’ASS le sous-continent relativement le plus aidé avec 44 dollars par habitant en 2005, deux fois plus qu’en 2000 et trois fois plus que la moyenne mondiale. Indicateur corroboré par le poids de l’aide dans l’économie : pour 80 % des pays de l’ASS, elle représente 5 % de leur production annuelle (produit intérieur brut). Pour 20 % d’entre eux, cette dépendance est encore plus lourde (10 % ou plus), notamment pour le Burundi, l’Érythrée, le Malawi, la Sierra Leone, le Mozambique, le Rwanda, le Cap-Vert, la Guinée-Bissau, la Centrafrique et l’Éthiopie.

Sans cette perfusion, les États africains concernés ne pourraient honorer leurs obligations souveraines : payer les fonctionnaires et assurer le fonctionnement des services publics de base (santé, éducation, infrastructures, sécurité). Cette utilisation de l’aide n’a pas été d’une grande efficacité dans les années 1960 et 1970, au cours desquelles certains États africains étaient embarqués dans la guerre froide entre les deux grandes puissances de l’époque, l’Union soviétique et les États-Unis. La première fournissait de l’aide militaire à profusion et la deuxième un concours financier facile à détourner par les dirigeants.

Le bilan de ce formidable gâchis (près de 300 milliards de dollars) n’a jamais été sérieusement établi, à supposer qu’il puisse l’être un jour. Les intérêts des uns et des autres étaient tellement imbriqués qu’il est impossible de distinguer les tricheries des vrais échecs économiques. Le résultat est qu’aujourd’hui l’ASS en est au même point qu’en 1960, sinon en recul, alors que l’Asie et l’Amérique latine, qui ont elles aussi subi des dictatures, des guerres et des catastrophes naturelles, ont parachevé leur décollage.

La conséquence de tout cela est une baisse générale de l’aide d’origine publique sous sa forme classique et la meilleure, l’aide-projet. La moitié de l’aide est désormais consacrée au remboursement des impayés d’avant 2004. Pour solder le compte des années perdues, les gouvernements occidentaux ont décidé en 2005 d’effacer l’ardoise et de ne plus accorder autant de prêts que par le passé. L’essentiel de leurs nouvelles interventions se fait désormais sous forme de dons.

Mais ce geste de salubrité publique, tant réclamé par les organisations non gouvernementales, est considéré comme une nouvelle aide alors qu’il n’a pas d’effet direct sur le développement économique (création d’emplois, valeur ajoutée). Il permet seulement de soulager le fardeau du budget des États endettés : les économies ainsi réalisées (pas de service de la dette à payer) sont censées financer des programmes de réformes administratives et des projets sociaux. Par exemple, sur les 23 milliards de dollars d’aide comptabilisés en 2005, la Banque mondiale estime la partie hors dette à 13,2 milliards de dollars.

Donc, les gouvernements occidentaux augmentent leur aide pour effacer la dette et réduisent le montant de leurs prêts : pour 2006, les dons ont atteint 36,9 milliards de dollars, et les prêts 1,8 milliard (dans la mesure où le remboursement des échéances encore dues dépasse de 1,8 milliard les versements reçus au titre des nouveaux prêts). Soit un flux net de 35,1 milliards de dollars. Pour la première fois depuis 2000, ce flux est inférieur à celui émanant du secteur privé sous forme d’investissements directs étrangers et de prêts bancaires privés. À l’avenir, il y aura ainsi de moins en moins de prêts publics et de plus en plus de capitaux privés. En espérant que cet inversion de tendance se fera cette fois dans l’intérêt de l’ASS et pas seulement de celui des bailleurs de fonds.

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